Le sujet de la traçabilité des pierres de couleurs revient de plus en plus souvent sur le devant de la scène médiatique. Contrairement aux mines de diamants, plus industrielles et dont le commerce est relativement contrôlé, les mines de pierres de couleurs sont artisanales dans 80 % des cas, le commerce est extrêmement fragmenté et les problèmes d’éthique ne sont pas les mêmes.
Patrick Voillot est gemmologue et auteur de nombreux livres et documentaires sur les mines qu’il parcourt depuis plus de 20 ans
P. Voillot est prudent sur les projets éthiques. Il ne veut pas faire d’amalgame avec la situation, très médiatisée, de la Colombie. Les mines sont aussi un écosystème qui fait vivre des milliers de personnes dans des pays pauvres et dont c’est parfois la seule richesse. « Il y a bien longtemps que les enfants ne descendent plus dans les mines et les mineurs sont des travailleurs comme les autres ». Ils vivent parfois mieux, mais de façon discrète. Aucune comparaison avec les diamants du sang. Quant à l’environnement, si les mines d’or utilisent du mercure et du cyanure, rien de tel dans l’exploitation des mines de pierres, souvent artisanale et naturelle. La vraie éthique, selon P. Voillot, serait d’aider les mineurs à creuser leurs galeries en toute sécurité, à les étayer. Ou de s’assurer que la couleur des pierres n’est pas trafiquée. La surenchère des prix sur la provenance les incite malheureusement à cette pratique.
Jean-Claude Michelou est vice-président de l’ICA (International Colored Stones Association), il s’exprime sur le projet de l’ONU (UNICRI)
Un projet de l’UNICRI vise à établir une sorte de « permis de conduire » de l’exploitation et du commerce des mines. Toute vente de pierres, devra être déclarée par écrit aux autorités locales. Le but ? Eviter le commerce des pierres volées ou d’origine douteuse, supprimer les exploitations « sauvages » et les intermédiaires peu scrupuleux pour mieux rémunérer les petits exploitants. Si le projet fait l’unanimité place Vendôme, où l’on y voit la parfaite continuité du processus de Kimberley, les pays concernés renâclent. Le Brésil, le Sri Lanka et certains pays africains adhèrent mais d’autres, moins à l’aise dans cette transparence, ne s’y associent pas encore… « Le processus sera long, mais il faut que tous y adhèrent, des gouvernements aux petits exploitants, car le système est basé sur la confiance, et non sur le contrôle et la coercition » déclare J-C. Michelou.