Olivier Segura, Directeur du Laboratoire Français de Gemmologie, ouvre ses portes à l’Officiel pour nous faire découvrir ses appareils d’analyses à la pointe dans la détection des diamants synthétiques.
www.laboratoire-gemmologie.bjop.fr
Directeur du LFG (Laboratoire Français de Gemmologie) depuis 2011, Olivier Segura est géologue et gemmologue. Il a été formé au GIA et à l’université de Nantes avant de se lancer dans le négoce de pierres, puis a été nommé directeur du LFG au moment de sa reprise en main par l’UFBJOP.
Un nouveau départ pour le LFG
Quatre gemmologues en blouse blanche s’affairent en silence autour d’une batterie d’appareils et de spectromètres dernier cri pour observer toutes les caractéristiques des pierres et des perles qui leur sont confiées : taille (et proportions de taille), couleur, pureté, poids, luminescence, origine géographique, présence et type d’inclusions, traces de traitement, composition chimique,… Après une analyse exhaustive, le croisement de toutes les données permet de réaliser une « carte d’identité » de la pierre ou de la perle avec une certitude absolue. Exceptionnel, le spectromètre Raman permet d’analyser la gemme au plus profond de la matière grâce à 3 lasers qui fonctionnent dans des longueurs d’ondes différentes. Un autre appareil (la microradiographie – tomographie) effectue des radiographies de très haute précision et des reconstructions en 3D des volumes, une technique ultra sophistiquée très utile pour l’analyse des perles.
L’Officiel Horlogerie & Bijouterie : En tant que nouveau directeur, quelle orientation donnez-vous au LFG ?
Olivier Segura : Avec l’aide de notre conseiller scientifique, Emmanuel Fritsch, qui fut pendant dix ans directeur de recherches au GIA et actuellement professeur à l’Université de Nantes, le LFG a souhaité renforcer ses bases scientifiques. C’est un projet que j’ai poursuivi afin d’établir de véritables procédures, développer des partenariats avec l’université de Nantes, publier dans des revues scientifiques reconnues telles que Gems&Gemology et la Revue de l’AFG. Le but étant toujours d’affirmer et de faire reconnaître la grande rigueur scientifique du LFG. Un gage de qualité et de sécurité pour nos équipes et nos clients. Un succès, puisque de plus en plus de professionnels et de particuliers nous font confiance, en France et à l’étranger.
La détection des diamants synthétiques plus rapide et moins coûteuse
L’OHB : Vous avez attiré notre attention sur les nouvelles techniques de détection du diamant synthétique. Qu’appelle-t-on diamant synthétique ?
O. Segura : Utilisé dans l’industrie, qui est sa destination première (outils de forage, tranchants…), le diamant synthétique va permettre de faire de considérables progrès, par exemple pour l’informatique de très haute vitesse où il ouvre un extraordinaire champ des « possibles ». Mais en joaillerie, son utilisation est malheureusement souvent frauduleuse et trompeuse. Au Laboratoire, le critère nature ou synthétique est automatiquement vérifié pour tous les diamants, de grande taille comme les mêlés. Seules des méthodes de laboratoires permettent de distinguer les diamants synthétiques, qui ont les mêmes caractéristiques physiques et optiques que les diamants naturels.
L’OHB : Comment se fabrique un diamant synthétique ?
O. Segura : Il existe deux méthodes, développées dans les années 1950 : – La méthode HPHT (haute pression haute température) qui consiste à placer une source de carbone dans les conditions particulières de cristallisation du diamant. – La méthode CVD (Chemical Vapor Déposition ou dépôt en phase gazeuse) qui consiste à créer un plasma qui va cristalliser en diathétiques. Or on maîtrise mieux la technologie et les coûts de l’énergie aujourd’hui. Cependant, sur le marché francais, on se rend compte qu’il y a peu de diamants synthétiques « cachés ». Les négociants et bijoutiers connaissent bien leur matière et font confiance au LFG au moindre doute.
Les mêlés sous l’oeil du microscope
L’OHB : On trouve les diamants synthétiques surtout dans les mêlés, n’est-ce pas ?
O. Segura : Oui, ce sont des pierres de petite dimension, donc les plus faciles à fabriquer. Par ailleurs ces pierres synthétiques incolores peuvent passer inaperçues, quand elles se retrouvent mélangées dans des lots importants avec des diamants mant sur un germe de diamant (lui-même naturel ou synthétique).
L’OHB : Pouvez-vous faire un état des lieux de la présence de diamants synthétiques sur le marché de la bijouterie-joaillerie ?
O. Segura : En plus de la technologie complexe a mettre en oeuvre, la fabrication du diamant synthétique est énergivore, elle a donc longtemps été très coûteuse, et finalement peu compétitive par rapport au prix du diamant naturel. On trouvait peu de diamants synnaturels. On en trouve peu de grosse taille en fraude, car tous les diamants importants sont accompagnés d’un rapport de laboratoire sérieux. En ce qui concerne les diamants synthétiques de couleur jaune, le problème est plus préoccupant. En effet il est plus facile de fabriquer un diamant synthétique jaune qu’incolore. Les lots de diamants mêlés jaunes peuvent donc contenir une quantité non négligeable de pierres synthétiques.
L’OHB : En quoi votre spectromètre à infrarouges Bruker est-il à la pointe de la détection de ces diamants ?
O. Segura : Ce spectromètre a été développé en partenariat avec le fabricant et a fait l’objet d’un dépôt de brevet. Il contient en effet un porte-échantillon tout à fait unique et adapté qui permet d’analyser plusieurs centaines de diamants en même temps. On isole ainsi les diamants de type IIa, de façon automatique, rapide, et moins coûteuse. Et pour le moment tous les diamants synthétiques sont de type IIa, alors qu’ils représentent moins de 5 % des diamants naturels. Donc il est facile de les isoler pour les tester ensuite par d’autres méthodes (Raman …). Le problème sera plus compliqué quand on commencera à trouver des diamants qui ne sont pas IIa car il faudra tester tous les mêlés. Olivier Segura rappelle que le meilleur moyen de se prémunir contre la fraude est de rester dans les circuits d’achats officiels et reconnus, et de ne pas hésiter à faire appel à un laboratoire. La détection est devenue plus simple, plus rapide et moins couteuse aujourd’hui en Laboratoire.