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Régulièrement, l’OHB fait le point sur l’évolution de la traçabilité et de l’éthique dans l’univers des pierres de couleur. Sur ce sujet, nous avons interviewé Émilie de Poncheville, Sales & Communication Manager de la Maison Piat, un lapidaire connu.
L’Officiel Horlogerie & Bijouterie : Pourquoi est-il si difficile d’implanter des normes dans la profession ?

Émilie de Poncheville : Une soixantaine de pays est concernée aujourd’hui par l’extraction des pierres de couleur. Mais contrairement à ce qui caractérise l’extraction du diamant où 85 % des mines sont industrielles, dans le domaine des pierres de couleur, 80 % des exploitations sont artisanales.
Nous sommes donc face à de petites mines, de nombreux acteurs et des pays dont les structures financières, juridiques et politiques n’ont rien à voir avec les nôtres. Trouver un terrain d’entente avec toute la filière locale prend donc du temps.

L’OHB : Quels sont les projets en cours ?

E. P. : On peut saluer l’initiative du RJC (Responsible Jewellery Council). Il vient d’étendre aux pierres précieuses de couleur l’application du CoP (Code of Practices) qui garantit les bonnes pratiques des acteurs. Autre initiative intéressante, sur la traçabilité cette fois-ci, le laboratoire suisse Gübelin, en
partenariat avec la société Everledger, a créé la Provenance Proof Blockchain, qui garantit la traçabilité de la pierre à chaque étape de la chaîne de valeur. De plus, l’application d’un traceur physique de type Emerald Paternity Test dès la sortie de la mine permet de suivre un brut ainsi que toutes les pierres taillées qui en seront issues.

Un autre projet nous tient à coeur, celui de l’ARM (Alliance for Responsible Mining), qui a déjà rencontré un beau succès avec l’or éthique issu de petites mines locales. Nous poussons l’ARM à adopter le même référentiel pour les pierres de couleur. Concernant les initiatives régionales, le Sri Lanka maîtrise bien ses ventes de pierres mais ce n’est pas le cas de Madagascar, par exemple.

L’OHB : Quelles sont les marques ou les sociétés qui font vraiment bouger les lignes ?

E. P. : Toutes les grandes marques sont concernées, actives sur ce sujet et s’engagent dans un sourcing responsable. Sur un plan médiatique, on peut citer Chopard et Tiffany. Chopard n’utilise plus que de l’or éthique. Tiffany, en communiquant ouvertement sur ses pratiques responsables et en se portant garant de bonnes pratiques, contribue aussi à faire avancer les choses. De plus petits joailliers ont également construit leur ADN de marque sur l’éthique et la traçabilité des pierres de couleur.

L’OHB : Vos clients, les joailliers, exigent-ils une éthique de la provenance ?

E. P. : Pour certains, c’est devenu une vraie condition et ils nous demandent de fournir des références. Cela fait partie de leur cahier des charges. Même si leurs clients ne leur demandent pas, les joailliers veulent acheter des pierres irréprochables et nous sommes très sensibilisés à ce sujet. C’est une tendance qui s’impose. Autant prendre de l’avance.

L’OHB : Vous avez souligné la lenteur des progrès. Comment les choses pourraient-elles aller plus vite ?

E. P. : La clef du succès est peut-être que la demande pour plus de transparence remonte du terrain, des clients eux-mêmes. Aujourd’hui, c’est une impulsion qui manque pour faire évoluer
la situation plus vite. I.H.

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