Après une année 2024 moins flamboyante que 2023, la filière de l’horlogerie-bijouterie débute 2025 avec prudence.
Il est encore extrêmement difficile d’imaginer quel sera le dynamisme du marché de l’horlogerie-bijouterie en 2025, tant il existe de multiples inconnues liées à la conjoncture économique et politique française et aux aléas géopolitiques.
Hervé Buffet, délégué général de Francéclat qui regroupe les filières horlogerie, bijouterie et arts de la table, espère simplement «qu’on puisse assister à une consolidation de 2024, ce qui est déjà pas mal si on se place par rapport à 2019». Une année référente avant l’emballement post-covid qui s’est atténué en 2024.
De fait le ralentissement du marché du luxe, porté par la Place Vendôme, a mené à un certain atterrissage du secteur. La hausse du cours de l’or a clairement perturbé une année très inégale, tandis que l’instabilité internationale et politique ainsi que le manque de confiance ont affaibli un marché censé faire envie et faire rêver.
Pour Guillaume Adam, secrétaire du syndicat France Horlogerie (ex-Chambre française de l’horlogerie et des microtechniques), le pôle de ses adhérents aurait quand même enregistré «malgré un contexte compliqué» une activité en croissance de 7 % en 2023 et de 3 % en 2024.
Estimé à environ 3,5 milliards d’euros par Francéclat, le marché de l’horlogerie a poursuivi, selon Guillaume Adam, «sa trajectoire de croissance mais de manière plus modérée». Une croissance qu’il attribue notamment «à une forte propension à l’export dont la tendance reste positive».
L’export soutient le marché
«Les marques emblématiques de l’horlogerie française ont continué à enregistrer une forte demande à l’export. Cependant l’inflation et la hausse des coûts des matières premières ont légèrement modéré la rentabilité. Le secteur est toujours influencé par les nouvelles tendances et la quête de qualité ».
Cette tendance positive apparait notamment portée par la forte demande dans les segments de l’horlogerie de luxe et des montres connectées. La montre de luxe reste en particulier le moteur principal de cette dynamique avec une préférence marquée pour les modèles mécaniques.
Le segment des montres connectées connaît également un fort développement notamment auprès des jeunes consommateurs. Environ 20 % du marché serait désormais occupé par ces montres intelligentes plébiscitées en particulier pour leurs fonctions dans le sport et le bien-être.
Réindustrialiser pour nourrir la dynamique du secteur
La tendance positive est aussi illustrée par la bonne santé de l’écosystème horloger qui voit des marques françaises historiques continuer de se développer tandis que «d’autres émergent chaque année et apportent de la vitalité au marché », souligne Guillaume Adam.
Selon lui, il existe de nombreux exemples d’investissements émanant de belles PME horlogères qui réintègrent des composants français dans tout ou dans une partie de leur fabrication et de jeunes marques avec des mouvements de fabrication française.
Un constat qu’il analyse comme l’enclenchement d’un mouvement de réindustrialisation de la filière. «On s’attache aujourd’hui à accompagner la réinternalisation des compétences et des savoir-faire traditionnels, et à favoriser de nouvelles compétences pour renforcer la production française de montres et de composants horlogers».
Dans le cadre du plan France 2030, le secteur de l’horlogerie bénéficie même d’une attention particulière dans le but de renforcer son positionnement mondial, d’encourager les innovations et de soutenir la transition écologique.
La France souhaite revitaliser sa production de haute précision et redonner une place centrale à ces métiers d’art en soutenant la réindustrialisation du secteur horloger en particulier dans les régions du Doubs et du Bas-Rhin mais également sur l’ensemble du territoire national.
Les deux leviers majeurs sont la création à venir d’un Espace collaboratif d’innovation horloger et le lancement de l’initiative «grappes d’entreprises ». «L’objectif est de contribuer à créer d’ici 2030 environ 1 200 emplois et 250 millions d’euros de chiffre d’affaires supplémentaires tout en réduisant l’impact carbone de la filière horlogère», rappelle Guillaume Adam.
Le segment de la bijouterie fantaisie haut de gamme séduit
Développer les innovations est un objectif sur le marché de la bijouterie qui doit lui aussi « sans cesse se réinventer», martèle Valérie Dassa, présidente de la BOCI, l’organisation professionnelle qui regroupe les métiers de la bijouterie fantaisie, les métaux précieux et les industries appliquées aux métiers d’art.
Selon elle «le marché de la bijouterie en France maintient sa trajectoire grâce aux segments du luxe et à la bijouterie accessible tout ceci malgré un contexte économique incertain ». Sur un marché de la bijouterie-joaillerie en France estimé selon Francéclat à plus de 7 milliards d’euros, le luxe aurait continué à bénéficier de la demande auprès des marques emblématiques de la place Vendôme.
La bijouterie accessible n’aurait pas été en reste en 2024 en dépit d’une conjoncture économique malmenée. Si la demande se dirige de plus en plus vers des produits responsables «où le consommateur est en quête de traçabilité», Valérie Dassa évoque la montée en puissance d’un nouveau segment : «la bijouterie fantaisie haut de gamme » qui permet d’élargir l’offre des bijouteries traditionnelles.
Un circuit d’ailleurs intéressant pour la bijouterie fantaisie qui a atteint en 2024 « la stabilité ».
E.R.