Le RJC (Responsible Jewelry Council) fête cette année ses 15 ans. Constitué en 2005 avec 14 membres, il en compte aujourd’hui plus de 1 230 et étend maintenant ses prérogatives aux pierres de couleur. L’OHB a interviewé sa directrice générale Iris Van der Veken, accompagnée de Nawal Aït-Hocine, directrice de A Positive Impact Sarl et conseil du RJC.
L’OFFICIEL HORLOGERIE & BIJOUTERIE : Quel est le rôle du RJC ?
RJC : Le RJC est l’organisme de référence au sein de l’industrie joaillière et horlogère pour la certification des normes d’intégrité et de responsabilité. Notre Code des Pratiques (CoP) est le seul standard qui couvre l’ensemble de la chaîne de valeur, de la mine à la vitrine. Notre politique s’inscrit dans la durée, nous travaillons sur le long terme pour instaurer de nouveaux comportements qui soient respectueux des conditions de travail selon les critères de l’OIT, des droits humains, de l’économie, de l’environnement… Nous cherchons à rendre les gens responsables de ce qu’ils produisent, mais aussi de ce qu’ils achètent ou vendent. En toile de fond, il doit toujours y avoir cette question : « Avec qui fait-on du commerce ? ».
Le RJC est là pour aider les sociétés à progresser, nous ne voulons pas faire la révolution mais inciter à l’évolution. Le RJC révise régulièrement son Code de Pratiques pour le rendre plus performant. Le dernier en date, celui de 2019, inclut de nombreux changements et englobe, cela est nouveau, les pierres précieuses de couleur.
L’OHB : Quels sont les principaux défi s auxquels le RJC est confronté ?
RJC : Le monde des pierres de couleur est artisanal à 85 % pour l’extraction, contrairement à celui du diamant qui est très structuré. Nous allons travailler sur la prise de conscience, l’éducation des acteurs locaux qui sont nombreux et souvent de très petite taille. Cela suppose une approche nouvelle et différente de notre part. L’initiative du RJC est récente, le premier CoP qui s’applique aux pierres de couleur date de 2019, donc nous n’en sommes qu’au démarrage.
Mais déjà, nous avons de nouveaux membres qui traitent exclusivement des pierres de couleur et qui sont certifiés RJC ou en voie de certification.
L’OHB : Rencontrez-vous des difficultés spécifiques dues aux législations des pays ou aux habitudes culturelles ?
RJC : Nous respectons toujours la loi locale, même quand celle-ci est éloignée de nos standards. Dans ce cas-là, nous parlons de « soÇ law », de pratiques éthiques, de valeurs, au-delà du respect de la loi. Dans la plupart des cas, les gouvernements sont réceptifs à nos demandes mais c’est un long travail car nous abordons le problème dans son ensemble, sur toute la chaîne de valeur, impliquant de nombreux acteurs.
C’est aussi ce qui fait la force du RJC et le rend crédible.
L’OHB : La CoP de 2019 concernet- elle aussi les pierres fines ou seulement les pierres précieuses ?
RJC : Nous commençons par les pierres précieuses et en viendrons ensuite aux pierres fines, qui bénéficieront de cette expérience nouvelle et des outils mis en place.
Encore une fois, nous restons pragmatiques et avançons étape par étape. Nous avons aussi pleinement intégré les exigences du Guide OCDE sur le devoir de diligence pour des chaînes d’approvisionnement responsables en minerais provenant de zones de conflit ou à haut risque. Ces exigences ont été reprises dans les règles de la Due Diligence de l’Union Européenne
(ndlr : sur ce sujet, voir notre numéro de janvier « Due Diligence Ready ! Comment gérer l’obligation de vigilance »). Elles constituent un outil important pour avancer et harmoniser les pratiques.
L’OHB : Les millenials sont très courtisés par les fabricants de
diamants synthétiques. En face, votre voix est peu audible et ils pourraient penser qu’il y a un déficit d’éthique dans la production du diamant. Comment faire connaître vos actions auprès du grand public ?
RJC : Au départ, la cible du RJC n’est pas vraiment le grand public. Celuici n’accorde pas une certification à un produit mais à des pratiques, des systèmes de management, à la façon dont une entreprise est gérée.
Nous sommes donc plutôt au niveau BtoB. Le RJC communique surtout auprès des professionnels, des bijoutiers et des horlogers pour lesquels nous préparons en ce moment des outils. La DPA (Diamond Producers Association) avec qui nous sommes partenaire, réfléchit actuellement à la meilleure manière de communiquer vers la cible du public et des jeunes.
L’OHB : Quels sont vos projets dans les années qui viennent ?
RJC : Nos actions sont basées sur 3 piliers : aider nos membres en créant des outils qui leur permettent d’appliquer les codes du RJC en rendant les choses simples et réalistes pour qu’elles soient comprises et intégrées par l’ensemble des acteurs. Deuxièmement, nous voulons garder notre rôle de leader, d’influenceur et notre force de proposition sur toute la chaîne de valeur et enfin, nous développons les partenariats pour atteindre ces objectifs. En effet, le travail en réseau est fondamental et nous le privilégions en permanence. Nous travaillons en étroite relation avec l’UFBJOP, l’Antwerp World Diamond Center ou encore le Plumb Club aux États-Unis par exemple.
Notre message ? Communiquer d’une seule voix avec tous les professionnels et avoir un seul message, un message clair. Les pierres et la joaillerie relèvent du domaine de la beauté. Ce qu’il y a en coulisse doit aussi être beau. I.H.