La contrefaçon a bondi de 1 850 % entre 1994 et 2011, causant la perte de 270 000 emplois ces dix dernières années dans le monde, dont 125 000 dans la Communauté Européenne.
La contrefaçon coûterait 6 milliards d’euros à l’économie française, et représente entre 7 et 9 % du commerce mondial, selon les chiffres de l’Indicam, principale association de lutte anti-contrefaçon en Italie. Comment expliquer ces chiffres alarmants ? La qualité monte en gamme, les faux sont de plus en plus difficiles à repérer, et les marques voient parfois arriver sur le marché leurs produits… qui ne sont pas encore lancés ! Il faut donc mener l’offensive par des campagnes anti-contrefaçon très visibles qui jouent sur la crainte (ce que vous risquez en tant qu’acheteur) et sur l’égo (« Fake Watches are for Fake people » FHH). Depuis les très médiatiques procès que LVMH et Tiffany ont fait à eBay en l’accusant de vendre des faux, les sites de e-commerce sont plus prudents, et certains garantissent même l’authenticité des produits.
En 2012, de grands sites de vente (dont PriceMinister) ont signé une charte avec les grandes marques sous l’égide du Ministère de l’Industrie.Louis Vuitton, probablement le plus copié au monde, a annoncé avoir conclu un accord de lutte anti-contrefaçon avec le site internet Taobao.com, qui appartient au numéro un chinois du commerce en ligne Alibaba. Une victoire énorme pour le maroquinier. Taobao.com, un des sites de vente les plus visités au monde, affiche plus de 500 millions d’utilisateurs en Chine et propose quelque 800 millions de produits. Cette avalanche d’offres sur Internet a énormément fluidifié le marché de la contrefaçon. Hermès affirme que sur certains sites, 80 % des produits Hermès présentés sont des faux. Mais le danger vient parfois d’institutions respectées supposées défendre le droit et le respect des lois. Ainsi depuis un an, le comité Colbert, l’Unifab et le Comité national anti-contrefaçon ferraillent contre un arrêt de la Cour de Justice de l’Union européenne qui interdit désormais aux douaniers de saisir des produits en transit en Europe vers des marchés étrangers*.
L’an passé, cette jurisprudence a réduit drastiquement le nombre de produits saisis en France (4,6 millions, contre 8,9 millions en 2011). Une aberration ! Certains pays membres de l’UE ne sont pas irréprochables non plus. L’Italie, pourtant un berceau du luxe, importe de nombreux composants de Chine pour assemblage sur la péninsule, ce qui lui permet d’éviter le piège des douanes. Le loup est dans la bergerie. Les chiffres semblent effrayants pour l’horlogerie dans ce pays où, pour certaines marques, jusqu’à 70 % des pages Internet renvoient à la contrefaçon. Ce fléau menace des millions de postes en Europe, si l’on compte tous les acteurs et sous-traitants de la filière. De quoi faire froid dans le dos. La Fondation de la Haute Horlogerie publie des chiffres record : $ 500 milliards de chiffre d’affaires et plus de 40 millions de fausses montres produites par an … contre 30 millions de vraies montres suisses.
Les marques françaises sont très actives dans la lutte, avec en porte-étendard le Comité Colbert, qui a diffusé cet été avec les douanes dans les 18 principaux aéroports de France, 10.000 affiches (« En France, la loi prévoit jusqu’à 300.000 euros d’amende et 3 ans d’emprisonnement ») et 50.000 dépliants donnant un sévère avertissement sur le ton de l’humour. Depuis 1995, le Comité diffuse une campagne tous les deux ans, et sollicite la coopération active des groupes bancaires et opérateurs de paiements en ligne comme Visa, Mastercard, Americain Express ou PayPal. En horlogerie, les collectionneurs habitués à acheter sur Internet ont des méthodes « quasi » imparables telles que la vérification du numéro de la pièce auprès de la maison mère. Mais la réputation du vendeur reste encore la meilleure des garanties. En joaillerie, il est extrêmement difficile de reconnaître une fausse pierre. Souvent, et même pour un joaillier professionnel, seul un laboratoire (LFG, GIA, HRD, IGI,…) pourra définir l’authenticité de la pierre lorsque la source d’approvisionnement n’est pas certaine.
* Arrêt Nokia/Philips, 2011, Cour de Justice de l’Union européenne (… « ces marchandises peuvent, en revanche, porter atteinte audit droit et donc être qualifiées de «marchandises de contrefaçon» ou de «marchandises pirates» lorsqu’il est prouvé qu’elles sont destinées à une mise en vente dans l’Union européenne …».