Les entreprises de commerce de produits de luxe semblent vent debout contre la nouvelle loi Sapin qui interdit les achats en liquide de plus de 1 000 € pour les résidents français et 10 000 € pour les résidents étrangers, au lieu de 3 000 et 15 000 € respectivement. Or les achats de montres et bijoux de moins de 1 000 € représentent 40 % du marché ! Et 1 000 € en joaillerie, comme en horlogerie de luxe, c’est à peine plus que le prix d’entrée de nombreuses pièces achetées par les étrangers en France. Or ceux-ci payent très souvent en liquide selon leurs habitudes culturelles et locales tout à fait courantes.
On sait que les touristes russes, déjà à la peine avec un rouble en berne, ont l’habitude de payer en liquide. Cette nouvelle mesure très contraignante, liée au fait que la plupart des boutiques ne peuvent ouvrir le dimanche en France, n’est-elle pas de nature à inciter davantage les touristes à aller faire leurs emplettes à Londres ? Le but avoué est de lutter contre le terrorisme. Celui-ci aura tôt fait de s’adapter à la nouvelle loi. Un journaliste du Figaro rappelle qu’ « Amedy Coulibaly avait contracté un prêt à la consommation de 6000 euros chez Cofidis pour financer ses attentats ». Celui-ci « avait fourni des informations erronées qui n’avaient pas été vérifiées ». Et par ailleurs, la liberté totale d’ouvrir des comptes Nickel dans les bureaux de tabac (une identité falsifiée étant toujours possible) ne semble alerter personne… En revanche, le tort porté aux produits de luxe, source de revenus importante en France, ne semble guère avoir été pris en compte !
Les horlogers et joailliers sont déjà soumis à de fortes exigences par la loi (respect du droit douanier pour le rachat d’or, obligation de déclarer à TRACFIN les règlements dont les fonds ont une origine douteuse). Les renforcer n’aura qu’un effet très limité sur les auteurs de malversations qui trouveront vite la parade. L’Alliance du Commerce, qui regroupe les grands magasins parisiens (Galeries Lafayette et Printemps Haussmann, BHV Marais, Le Bon Marché…) et les professionnels de la chaussure et du prêt-à-porter ont aussi vivement protesté. Les Galeries Lafayette et le Printemps enregistrent 20 % de leurs achats en liquide. Il est malheureusement peu probable que le gouvernement revienne sur sa décision.