Pour un coup d’essai, ce fut un coup de maître ! Le Comité Francéclat nous a éblouis par la qualité des créations présentées lors de l’exposition Reflets.
Sur 1 000 m2 dédiés au Palais de Tokyo, le très avant-gardiste musée parisien ouvert tous les jours jusqu’à minuit, 200 créateurs ont exposé 500 bijoux du 29 mai au 3 juin. Ateliers de création pour enfants, conférences, films, démonstrations de gouaches et de fabrication (Afedap, Ecole Boule, BJOP,ING,…), de CAO (Cetehor, Dassault Systèmes), tout était prévu pour faire pénétrer le public dans le monde magique de la joaillerie et l’étonner avec des créations insolites.
Dans un espace vaste et lumineux sous une verrière, l’exposition s’ouvre sur un immense lustre cylindrique formant une cascade de néons (on se prend à aimer le néon…) éclairant des chaînes et des sautoirs accrochés en feston. Plus loin, dans des coffres de plexi suspendus et mobiles, l’or s’expose dans tous ses effets de style, de matière et de texture. Les bijoux sont architecturés, embossés, texturés, striés, polis, brossés : manchette bobine de fils d’or où s’agrippe un gros diamant, bracelet ruban, bracelet conique enlacé d’une spirale de 82 pierres fines (134 carats), bague sertie de minuscules cailloux gris, en fait des diamants bruts, ou montée en deux carrés superposés sertis de diamants champagne, et tant d’autres dessinées avec une imagination folle. Viennent ensuite les pièces serties, mini-briolettes caparaçonnant un tourteau ou habillant un oiseau, béryl vert limpide de 46 carats, tourmalines rouge bordeaux ou vert émeraude, spinelles et grenats mandarins flamboyants, aigue marine Santa Maria rarissime (si vous n’êtes ni gemmologue ni joaillier, vous n’en verrez probablement pas de sitôt), saphirs orangés, diamants cognac, opales de feu, agates sculptées et bien d’autres, envoûtants par leur taille, leur densité, leur limpidité hors du commun. Sans compter les somptueuses et énormes perles grises, dorées ou mordorées… les visiteurs apprécient la chance, rare, de voir de telles beautés.
A l’honneur, Jean Vendome, grande figure des années soixante, dispose d’une immense vitrine centrale. Ses bijoux sont de véritables sculptures autour de pierres et de matières que le créateur voulait toujours parmi les plus belles, nacre en forme d’ailes d’oiseau, quartz blanc en forme de cristal neigeux, pavés de lapis-lazuli dont les extrémités, deux pinces de homard, retiennent un pendentif… Ces objets d’art sont des symboles de leur temps, destinés aux femmes émancipées et insolites. Plus loin s’expose sur un mur un cabinet des curiosités. A quelques mètres du serpent d’or de Boucheron (seul « vendômien » ici présent), un vaporeux collier en plumes et diamants (40 carats) côtoie un puissant collier dragon noir. Une large plaque d’or toute sertie et travaillée à l’endroit comme à l’envers jouxte un étonnant sautoir guerrier serti de colts… l’insolite exposition ne laisse aucun repos à notre imagination. Les visiteurs les plus curieux devineront même les bijoux du futur en s’attardant dans l’espace des tendances. A la fin, dans le petit couloir tout noir de l’espace « anti-reflet », de lumineux papillons en calcédoine bleu ciel sont posés sur un fil d’acier barbelé noir, des diamants de couleur, des pierres précieuses, dont une émeraude de 20 carats, sont sertis sur de l’or noir. Les précieuses gemmes sont comme des fleurs écloses sur des pierres de lave, ciblées par un rayon de lumière qui en accentue le contraste.
Les ateliers pour enfants ne désemplissent pas, les conférences non plus, pour lesquelles le Comité Francéclat a recruté de fines lames (Olivier Ségura, Patrick Voillot, Alain Kimmerlé, Marc Alexandre,…) connaissant sur le bout des doigts le diamant bleu, la tanzanite ou l’opale. Ces baroudeurs d’Afrique et d’Asie s’embarquent dans des récits fascinants, parfois aussi effrayants. Car le commerce des gemmes, c’est la confiance sans filet et une bonne dose de chance et d’intuition. Après un succès bien mérité (14 000 visiteurs en 6 jours), espérons que le comité Francéclat récidivera. Didier Roux, son président, ne boude pas son plaisir : « Je suis comme un vigneron, je vais chercher l’insolite et les réserves de magie cachées dans les caves. C’est toute la vitalité immergée du métier que vous voyez ici ». Un beau millésime en effet. Un écho au credo de Jean-Jacques Picart, proche conseiller de Bernard Arnault, qui parle d’ « un luxe qui demande à être déniché » et n’a pas pignon sur rue, mais qui est peut-être l’avenir. D’ailleurs, la place Vendôme ne fait-elle pas régulièrement appel aux talents de ces créateurs qui insufflent un sang nouveau à ses propres ateliers d’artistes.