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UNE DISTRIBUTION HORLOGÈRE PLUS CONCENTRÉE ET PLUS INTERNATIONALE
Maison Boucheron Paris ©Boucheron

UNE DISTRIBUTION HORLOGÈRE PLUS CONCENTRÉE ET PLUS INTERNATIONALE

C’est l’une des conséquences de la crise sanitaire. La réorganisation du retail horloger prend de l’ampleur, s’élargit, s’internationalise, monte en gamme et se diversifie. Le mouvement avait déjà commencé avant 2020 avec un réseau à deux vitesses, celui des groupes et des enseignes projetés vers le futur, adapté à une nouvelle génération d’acheteurs connectés et une distribution un peu plus secouée par la digitalisation.
Le paradoxe d’une distribution mondiale plus concentrée pour une offre plus différenciée

Plusieurs facteurs ont contribué au bouleversement du retail et l’ont accéléré. La crise du covid a vu l’émergence en force du e-commerce, qui n’est pas près de revenir en arrière. Ce phénomène a été doublé par une nouvelle tendance, assez inattendue par son ampleur, le goût du vintage. Par ailleurs, une clientèle très aisée et exigeante (le nombre de millionnaires et de milliardaires dans le monde ne cesse d’augmenter d’année en année) s’intéresse de plus en plus au marché de l’horlogerie. On assiste ainsi à une refonte du modèle de distribution classique : concentration des acteurs multimarques, montée en gamme, digitalisation, diversification vers le haut, recherche de la rareté et de l’exclusivité de l’offre de produits et de services, ouvertures de boutiques monomarques prestigieuses, rénovation / transformation luxueuses de flagships, meilleure place accordée au bien-être du client, au patrimoine de marque et au storytelling. En France, les incroyables rénovations des boutiques phares de la place Vendôme et de la rue de la Paix, dont celle de Boucheron reste un modèle du genre, ne sont que la partie émergée de l’iceberg. La marque Rolex reste une exception, comme un îlot dans cet océan de concentration et de retour à une politique de distribution plus personnalisée. En effet, la marque suisse reste présente uniquement en boutiques multimarques. Et lorsqu’elle semble ouvrir des boutiques en propre, c’est toujours en s’adossant à un revendeur multimarque, stratégie invisible à l’oeil nu pour le client.

Des réseaux de « super-détaillants » toujours plus puissants

La nouvelle politique de concentration des réseaux a été possible grâce à des rachats ciblés de détaillants trop petits pour faire face à la croissance et à l’internationalisation du marché, à des partenariats, à un travail de fond sur l’expérience client cross canal, à un choix de marques et modèles plus réfléchis, capable de créer la différence avec la concurrence et de renforcer l’attractivité du point de vente. Signe annonciateur de ces changements, Bucherer rachetait en 2018 l’américain Tourneau, établi depuis plus d’un siècle, puissant détaillant à la tête de 28 boutiques multimarques sur le continent américain. La concentration donne parfois le tournis. À côté de Bucherer (70 boutiques en Europe et aux USA) ou de The Watches of Switzerland (170 boutiques au UK et aux USA), l’américain Signet Jewelers compte 2000 points de vente (USA, UK, Canada) quand les puissants groupes chinois Luk Fook Holdings (Asie, USA, Australie) et Chow Taï Fook (Asie, USA) en affichent respectivement 2000 et 4000 ! (source Europa Star).

Une nouvelle génération de détaillants

L’offre adaptée à une nouvelle génération de clients très informés passe aussi par la mise en place d’une offre différenciée et d’un accueil en boutique irréprochable. Si le e-commerce a fortement challengé la boutique physique, il ne l‘a pas tuée. Le travail sur l’expérientiel client, le soin apporté au parcours online-offline sans accroc est devenu essentiel. Bucherer redouble d’efforts pour continuer à séduire en proposant des modèles exclusifs Bucherer BLUE en partenariat avec les marques, des montres CPO (Certified Pre-Owned) en parfait état ou encore en créant des boutiques-écrins où l’horlogerie côtoie l’art (Bucherer Gallery de Zurich). Ailleurs, une autre stratégie gagnante est la mise en lumière de marques d’indépendants ultra haut de gamme. Si ces dernières représentent un chiffre d’affaires très marginal, la haute technicité des modèles, l’exclusivité (quelques pièces haut de gamme par an entièrement réalisées à la main par des horlogers chevronnés), la culture du secret et le prestige de ces marques dans une cible ultra-réduite de collectionneurs séduit une clientèle masculine à très haut revenu. Ce sont souvent les mêmes qui sont aussi attirés par le vintage pour le côté rare et exclusif des modèles. D’où la mise en place progressive – encore timide – du vintage et des reprises par les marques. Le succès de cette nouvelle distribution repose avant tout sur un bon marketing. Le service client, une offre différenciée et, élément fondamental, la capacité à communiquer sur cette offre grâce à des outils digitaux très ciblés sont des atouts indispensables de cette nouvelle cartographie. I.H.

www.watches-of-switzerland