Page 104 - L'OFFICIEL HB Septemebre-Octobre 2021
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DÉCRYPTAGE
                                           Jean-Luc Buquet
                                           © Laurent Lagneau

                                              “Aujourd’hui, la reconnaissance

                                              par la marque a pris le pas sur

                                              la reconnaissance par l’objet”


                                              Paris chez Louis Vuitton et ailleurs.   dans la CAO, il devra absolument la
                                              Même  ma  clientèle  traditionnelle   maîtriser. Toutes les grandes places
                                              va plus souvent à Paris. Par ailleurs,   internationales y ont recours. Mais
                                              j’ai  été  très  impacté  par  les  Gilets   connaître  la  fabrication  manuelle
            on achète un tableau. Aujourd’hui,   Jaunes, ce qui m’obligeait à fermer   en  plus  serait  un  avantage,  qui
            la  reconnaissance  par  la  marque   le samedi. Ce fut une catastrophe.  ne  doit  pas  être  sacrifié  à  l’outil

            a pris le pas sur la reconnaissance                                informatique.
            par l’objet.                      L’OHB : Je n’ai pas trouvé
                                              votre site Internet…             L’OHB : Animer les boutiques,
            L’OHB : Qu’attendent les jeunes   JÇL. BUQUET : Je n’en ai pas. Je me sens   est-ce que cela rendrait le métier
            d’un bijou ?                      un peu dépassé par les boutons de   plus vivant ?
            JÇL. BUQUET : Ils attendent des bijoux   ces engins-là. Je préfère le contact   JÇL. BUQUET : Il y a quelques dizaines
            moins  chers.  Même  les  bagues   direct avec le client, l’écouter, com-  d’années,  au  moment  des  expo-
            de  fiançailles  n’ont  plus  la  même   prendre ce qu’il veut et le conseiller.   sitions,  la  société  Lyon-Alemand

            aura. Certaines de mes clientes ont   Internet  est  totalement  imperson-
            préféré  un  meuble  ou  même  une   nel, je ne suis pas convaincu…  (ndlr  :  maintenant  fusionnée  avec
            moto ! Il y a moins de repères tra-                                Cookson)  faisait  des  démonstra-
            ditionnels. Je n’ai pas vraiment mis   L’OHB : Que pensez-vous     tions  de  fonte  pour  le  public,  qui
            en place une offre pour cette jeune   du diamant de synthèse ?     pouvait  aussi  regarder  travailler
            clientèle,  je  préfère  rester  sur  la   JÇL. BUQUET : Etant donné les diffi cul-  des  tailleurs  de  pierre.  C’était  très
            qualité. Sinon, j’entrerais en concur-  tés  d’approvisionnement  en  dia-  intéressant  et  permettait  de  pro-
            rence avec des importateurs de sé-  mant qui s’annoncent, je pense que   mouvoir  nos  métiers.  Côté  forma-
            ries comme Leclerc, qui est devenu   le diamant de synthèse peut être un   tion,  il  n’y  avait  pratiquement  rien
            le  plus  grand  bijoutier  de  France.   relais. Je ne le cautionne pas mais   en province. Il existait des cours par
            Les clients sont aussi confrontés au   cela permettrait peut-être de payer   correspondance, que j’ai personnel-
            sentiment  d’insécurité,  ils  n’osent   moins cher le diamant et d’investir   lement suivis avant de venir à Paris.
            plus  porter  les  très  belles  pièces.   plus dans la créativité. Cependant,   Les  cours  de  gemmologie  étaient
            Lors des successions, celles-ci sont   en haute joaillerie, le client conti-  dispensés  par  des  personnes  qui
            souvent démontées pour être trans-  nuera à demander des pierres na-  venaient  de  Paris.  Les  chambres
            formées en bijoux plus simples. J’ai   turelles. Je fais un parallèle entre le   de commerce ainsi que des socié-
            encore  d’anciens  dessins  d’ateliers   diamant de synthèse et les pierres   tés  privées  comme  Lyon-Alemand
            destinés à des clients Américains…   précieuses  que  l’on  chauffe,  très   assuraient  aussi  des  formations.
            quand  je  les  regarde,  j’ai  envie  de   fréquentes sur le marché. Dans les   Il  y  a  beaucoup  d’Écoles  mainte-
            pleurer !                         deux  cas,  la  pierre  n’est  plus  vrai-  nant, mais il faut vérifier le conte-

                                              ment naturelle.                  nu  derrière  ces  belles  plaquettes
            L’OHB : La clientèle étrangère,                                    en  papier  glacé.  L’École  de  la  rue
            chinoise ou russe, reste friande   L’OHB : A un jeune bijoutier    du Louvre (ndlr : aujourd’hui Haute
            de belles pièces, les voyez-vous   qui s’installerait aujourd’hui,   École de Joaillerie / UFBJOP) a des
            parfois ?                         quels conseils donneriez-vous ?  formations  d’un  excellent  niveau.
            JÇL.  BUQUET  :  Non,  ils  vont  dans  les   JÇL.  BUQUET  :  S’il  est  bien  formé,  s’il   Je connais certains de leurs profes-
            grandes  villes  ou  fréquentent  les   a  une  bonne  main,  il  aura  ses   seurs, ce sont de très bons profes-
            boutiques  de  marque  dans  leur   chances  mais  il  n’aura  pas  les   sionnels. Je regrette qu’il n’y ait pas
            pays. Ils ne font que passer à Rouen   mêmes perspectives ni les mêmes   plus de formations de cette qualité
            et vont ensuite faire leur shopping à   certitudes que j’ai eues. L’avenir est   en province.  I.H.




       102 - L’OFFICIEL H&B | SEPTEMBRE-OCTOBRE 2021
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